Au sein du vaste échiquier géopolitique, l'Arménie occupe une place singulière en tant que nation sœur de la France, partageant des liens historiques et culturels étroits. C'est également une nation majoritairement chrétienne, dont le patrimoine religieux et culturel est d'une inestimable richesse.
Toutefois, aujourd'hui, l'Arménie se trouve face à une situation critique, où une véritable épuration ethnique menace sa population. Cette réalité douloureuse met en lumière un paradoxe : malgré ces liens historiques et culturels, l'Arménie semble délaissée par les puissances européennes, qui restent étonnamment inactives face à cette crise humanitaire.
Pour comprendre la complexité de cette situation, il est impératif de plonger dans l 'histoire riche de l'Arménie, de ses relations régionales tendues et des enjeux profonds qui sous-tendent le conflit. Il est essentiel d'analyser les parties prenantes, les acteurs internationaux impliqués, ainsi que les raisons cyniques de l'inaction de certaines puissances européennes, en dépit des liens culturels et des principes humanitaires qui devraient les pousser à agir.
Cet article se propose ainsi d'examiner en détail les actions préalables nécessaires pour mettre en place des sanctions contre l'Azerbaïdjan, en vue de faire cesser l'épuration ethnique en Arménie. Enfin, nous proposerons un mémorandum de sanctions, offrant un cadre concret pour que la communauté internationale puisse agir et sauver cette nation sœur de la France, tout en préservant sa précieuse identité culturelle et religieuse.
L'Arménie, située dans la région du Caucase en Eurasie (qui marque la séparation entre l'Europe au nord et l'Asie au sud) est un pays aux multiples facettes, à la fois ancien et contemporain, marqué par une histoire complexe.
Le pays offre une variété de paysages époustouflants, des montagnes majestueuses du Caucase aux vastes plaines du centre, en passant par des lacs aux eaux cristallines, c'est un joyau préservé du tourisme de masse.
Berceau de la chrétienté, le pays compte un nombre incalculable de monuments religieux, d'églises et de monastères (souvent situés au cœur de paysages pittoresques) dont beaucoup sont classés au patrimoine mondial de l'UNESCO (on pense notamment aux monastères de Geghard, Noravank, Khor Virap ou encore le temple de Garni par exemple).
Mais nichée entre la Géorgie au nord, l'Azerbaïdjan à l'est, l'Iran au sud, la Turquie à l'ouest, le pays est localisé dans une zone très conflictuelle et tendue, où les rapports de force peuvent être extrêmement violent. Malheureusement ce petit territoire doit vivre aux côtés de voisins belliqueux, impérialistes et très influents sur la scène internationale.
Sa voisine du nord, la Géorgie, doit faire face à des conflits internes extrêmement violents, notamment avec les provinces sécessionnistes d'Ossétie du Sud et d'Abkhazie (situation d'ailleurs assez similaire au Donbass ukrainien, mais le retentissement à l’international a été beaucoup moins important et l'armée Géorgienne a été anéantie par l'armée Russe en quelques jours, pas de vague de soutient ici).
L’élément crucial pour comprendre les conflits géopolitiques impliquant l'Arménie, l'Azerbaïdjan, la Turquie et l'Iran, réside dans le projet controversé du « corridor de Zanguezour ». Ce dernier vise à créer un couloir de transport partant de la province arménienne de Syunik pour atteindre le Nakhitchevan, offrant ainsi à l'Azerbaïdjan un accès sans entrave jusqu’à cette région autonome Azéri enclavée dans le territoire Arménien (pour ensuite atteindre la Turquie).
Certains considèrent cela comme une tentative visant à établir un passage reliant la Turquie aux républiques d'Asie centrale qui lui sont favorables, notamment le Kazakhstan, le Kirghizistan, le Turkménistan, l'Ouzbékistan et le Tadjikistan, dans le cadre d'une idéologie panturque (qui pourrait donc aboutir à la création d’un état, officiel ou officieux, panturque qui regrouperait tous les peuples turcs ou turcophones).
Nous allons cependant nous concentrer sur le territoire du Haut Karabagh (ou Artsakh), qui représente aujourd’hui le casus belli majeur entre l’Arménie, l’Azerbaïdjan et la Turquie.
Point Historique
Ce territoire a une histoire profondément liée à l'Arménie historique.
Pendant la période ourartéenne, du 9e-6e siècle avant J.C., qui fait référence à la civilisation de l'Ourartou (ou Royaume d'Urartu), cette région était connue sous le nom d'Ourtekheh. Des récits d'auteurs anciens tels que Strabon, Pline l'Ancien, Claude Ptolémée, Plutarque, Hérodote, Tacite, Dion Cassius, et d'autres encore, confirment qu'elle était considérée comme faisant partie de l'Arménie, ce qui est d’ailleurs corroboré par son riche patrimoine culturel et historique.
Au fil du temps, suite au partage du royaume d'Arménie en 387, l'Artsakh ou Haut Karabakh, qui était alors rattaché au Royaume de l'Arménie orientale, est passé sous la domination de la Perse. À cette époque, il faisait partie du Marzpanat arménien. Ce terme désigne une province ou une division administrative dans l'Empire Perse sassanide. C’était donc une province sous contrôle perse, où un marzpan (un gouverneur) été nommé pour superviser la région. Cependant, même dans cette configuration, l'Arménie a continué à avoir une identité distincte et une certaine autonomie. Les rois arméniens ont souvent été maintenus en place pour gouverner la région sous la suzeraineté perse.
Plus tard, pendant la période de domination arabe, l'Artsakh a fait partie de la vice-royauté d'Arménie, pour finalement devenir l'une des provinces du royaume arménien des Bagratides au 9e au 11e siècle, puis de la principauté arménienne des Zakarian au 12e au 13e siècle.
Au cours des siècles suivants, diverses dominations étrangères se sont succédé, tout en conservant une identité arménienne propre et un statut semi-autonome.
Au 17e siècle, la partie nord de la province a été envahie par des tribus turques, entraînant des conflits violents. Il s’agissait probablement de tribus nomades turkmènes ou ottomanes. Il est cependant important de noter que la Turquie moderne, en tant qu'État-nation, n'existait pas à l'époque, car elle n'a été fondée qu'en 1923. Au XVIIe siècle, la région était plutôt le théâtre de conflits entre différentes tribus et groupes nomades. Les tribus turques évoquées ici et envahissant les régions frontalières de l'Empire ottoman, de la Perse et de l'Arménie étaient souvent en quête de terres agricoles et de ressources. Ces invasions ont provoqué des conflits violents avec les populations locales, y compris les Arméniens.
Ces conflits frontaliers et ces invasions de tribus turques ont contribué à façonner l'histoire complexe et les tensions avec la Turquie moderne.
À la même époque, les cinq mélikats arméniens ont été formés, atteignant leur apogée au 18e siècle en termes de puissance et d'influence (groupe de cinq principautés semi-autonomes qui existaient dans la région de Syunik, qui englobait une partie de ce qui est maintenant la République autonome du Nakhitchevan, qui fait partie de l'Azerbaïdjan, et du Haut-Karabakh).
Historiquement, des régions aujourd’hui Azéris ont donc été rattachées à l’Arménie et vice-versa. L’instabilité de la région et les changements fréquents de domination n’aident pas à la compréhension.
Un point important reste la signature du traité de Gulistan, conclu entre les Russes et les Perses (actant la paix entre les deux empires) après la guerre de 1804-1813, qui marque le passage de l'Artsakh - Karabakh sous le contrôle de l'Empire russe.
Paix de courte durée puisqu’une autre guerre éclatera en 1826 jusqu’en 1828, à la suite de laquelle l'Empire russe obtiendra le contrôle de certaines parties supplémentaires de l'Arménie et de l'Azerbaïdjan actuels (traité de Turkmanchai).
A cette époque, la mainmise russe a eu un impact significatif sur la composition ethnique et la répartition des habitants. Les déplacements de populations, les migrations forcées et les conséquences de cette domination, ont contribué à influencer la nature des relations actuelles entre les Arméniens et les Azerbaïdjanais.
En 1923, après la Révolution et la guerre civile en Russie, la région a été intégrée dans la République socialiste soviétique d'Azerbaïdjan en tant qu'entité autonome appelée "Région autonome du Haut-Karabakh". Cette décision a été prise par les autorités soviétiques, bien qu'elle ait été controversée car la majorité de la population y était arménienne et souhaitait rejoindre la République socialiste soviétique d'Arménie.
Cette décision de rattacher le Haut-Karabakh à l'Azerbaïdjan a été prise par Staline, dans le cadre de la politique soviétique de division des régions sur des bases administratives plutôt que nationales. Elle était principalement d'ordre pratique, presque géométrique, et a été prise sans tenir compte des populations locales ni des aspects culturels propres à chacun des deux pays. Une situation qui nous rappelle le tracé des frontières et la découpe des territoires sur le continent africain …
Lors de l'effondrement de l'Union soviétique en 1991, le Haut-Karabakh a déclaré son indépendance de l'Azerbaïdjan, ce qui a conduit à une guerre entre les forces arméniennes et azerbaïdjanaises pour le contrôle de la région. Depuis lors, le statut de ce territoire est l'objet de négociations internationales et a toujours été un point de discorde entre les deux pays.
Bien que des tensions et des affrontements aient éclaté à divers moments autour du Haut-Karabakh (réprimés par les Russes), la guerre de 1988-1994 est de loin le conflit le plus marquant et le plus dévastateur associé à cette région.
Le conflit s'est terminé par un cessez-le-feu négocié entre l'Arménie, l'Azerbaïdjan et les autorités du Haut-Karabakh. Cet engagement a été médié par la Russie et a été suivi par la signature de l'Accord de Bichkek en mai 1994, mettant officiellement fin aux hostilités. Accord en grande partie respecté, bien que des affrontements sporadiques aient eu lieu à plusieurs reprises, notamment en 2016.
Le statut politique ce petit bout de terre reste cependant non résolu, et des pourparlers de paix sont en cours depuis des années pour tenter de trouver une solution permanente au conflit. En 2020, de nouveaux combats ont éclaté dans la région, aboutissants à un accord de cessez-le-feu en novembre 2020, négocié encore une fois avec l’aide de la Russie. Cet accord a conduit au déploiement de forces de maintien de la paix russes dans la région et à d'autres développements dans le but de résoudre le conflit de manière durable. Malheureusement cet objectif n’aura pas été atteint …
Les tensions entre Bakou et Erevan se sont aggravées ces derniers mois, l’Azerbaïdjan bloquant le corridor de Latchine, l’unique route reliant l’Arménie au Nagorny-Karabakh, ce qui a provoqué d’importantes pénuries dans l’enclave peuplée majoritairement d’Arméniens, qui durent finalement fuir leurs terres pour ne pas être exterminés.
Un couloir stratégique
On ne peut pas dire que la région du Haut Karabakh soit un eldorado économique ou une mine d’or qui justifierait alors un combat acharné pour son contrôle. C’est d’autres raisons qui poussent l’Azerbaïdjan à vouloir à tout prix s’accaparer ces terres.
Comme évoqué précédemment, une de ces raisons réside dans la création du corridor de Zanguezour. Projet largement soutenu par la Turquie (dans le cadre d’une idéologie panturque abordée plus haut), alors que l’Iran le voit d’un mauvais œil.
Le pays du Shah s’oppose à ce projet principalement en raison de préoccupations liées à sa propre sécurité et à sa position géopolitique. Si cette route était établie, elle permettrait à l'Azerbaïdjan d'accéder directement au Nakhitchevan (puis à la Turquie) sans avoir à passer par le territoire iranien. Ils craignent que la création d’un tel projet ne génère des tensions dans la région.
Ces dangers potentiels s’articulent autour de 5 points clefs :
- Une influence étrangère accrue : L’aboutissement de ce projet pourrait permettre à des puissances étrangères d'augmenter leur influence dans la région du Caucase.
- Des tensions ethniques : L'Iran compte une population azérie significative dans ses provinces nord-ouest, et cela pourrait potentiellement exacerber les tensions ethniques dans la région, ce qui pourrait avoir des répercussions sur la stabilité intérieure du pays.
- Le passage de troupes : La présence militaire azerbaïdjanaise dans le corridor pourrait être perçue comme une menace potentielle, surtout si elle était accompagnée de mouvements de troupes ou de matériel militaire.
- Les flux de réfugiés : En cas de conflit ou d'instabilité dans les regions attenantes aux couloirs de passage, l'Iran pourrait être confronté à un afflux de réfugiés, ce qui pourrait créer des défis humanitaires et sécuritaires.
- La concurrence économique : Le corridor pourrait créer une concurrence économique en tant que route de transit entre l'Azerbaïdjan et le Nakhitchevan, réduisant alors le volume de fret passant par le territoire iranien. En maintenant une frontière ouverte avec l'Arménie, l'Iran a un accès au nord pour le commerce, ce qui est essentiel compte tenu du blocus économique imposé par les États-Unis.
L'Iran est actuellement engagé dans des négociations avec l'Azerbaïdjan pour la création d'un corridor économique qui relierait l'Azerbaïdjan à la région autonome de Nakhitchevan, en passant par le territoire iranien. L'objectif de ce corridor est d'éviter de passer par le territoire arménien, ce qui permettrait à l'Iran de maintenir des liens ouverts avec l'Arménie. La création de ce corridor à travers le territoire iranien pourrait contribuer à renforcer la position économique de l'Iran dans la région.
Il est important de noter que, bien que ce corridor soit en discussion, il est peu probable que le projet du Panturquisme se limite à un seul corridor. Les ambitions pan-turques pourraient s'étendre à d'autres régions, comme le corridor de Zanguezour, pour promouvoir davantage l'unité des peuples turcophones de la région.
Les raisons de l’inaction des puissances internationales
L'apparente inaction des puissances internationales face au conflit arménien soulève des questions fondamentales sur les motivations qui guident leurs actions sur la scène internationale. Cette passivité pourrait s'expliquer par un triptyque complexe de facteurs : inefficacité, corruption et cynisme de la realpolitik.
Dans l'ensemble, il semble que l'inaction des superpuissances face au conflit arménien soit une combinaison de ces trois éléments, ce qui souligne la nécessité d'une réflexion critique sur la manière dont les puissances européennes abordent les conflits internationaux.
Inefficacité des mécanismes diplomatiques existants
Le groupe de Minsk, coprésidé par la Russie, les États-Unis et la France, a été créé en 1992 pour faciliter la résolution du conflit du Haut-Karabakh entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan. Cependant, malgré ses efforts et ses négociations, le conflit est resté sans solution pendant des décennies.
Plusieurs raisons expliquent cette inefficacité. Tout d'abord, les intérêts géopolitiques des coprésidents ont souvent divergé, ce qui a entravé leur capacité à parvenir à un consensus sur une approche de résolution du conflit. La Russie, par exemple, a maintenu une relation étroite avec l'Arménie, tandis que les États-Unis ont été plus proches de l'Azerbaïdjan. Ces divergences d'intérêts ont entravé la capacité du groupe de Minsk à exercer une pression efficace sur les parties en conflit.
De plus, les précédentes tentatives de cessez-le-feu et d'accords de paix n'ont pas réussi à être durables, le conflit reprenant souvent après de courtes périodes de calme. Cela a renforcé le sentiment d'inefficacité des mécanismes diplomatiques et a démoralisé les parties prenantes, décourageant ainsi les efforts en faveur de la résolution du conflit.
Aujourd’hui les divergences d’intérêts géopolitiques au sein du groupe de Minsk sont telles qu’il est impossible d’imaginer une résolution par ce biais.
L'Arménie a d’ailleurs manifesté sa frustration envers son traditionnel allié, la Russie, en raison de son incapacité présumée à la soutenir face à l'Azerbaïdjan. Cette frustration a été exacerbée par la situation géopolitique liée au conflit ukrainien. En septembre, l'Arménie a mené des exercices militaires conjoints avec les États-Unis, visant à améliorer la coopération des forces américaines et arméniennes dans le maintien de la paix. Cette démarche a été mal vue par la Russie, qui l'a considérée comme une mesure hostile.
Le porte-parole du Kremlin avait lui indiqué qu’un tel rapprochement entre Erevan et Washington nécessitait une analyse très approfondie, tout en maintenant que la Russie souhaitait poursuivre un dialogue étroit avec l’Arménie. Mais la déception règne chez les Arméniens face à l’incapacité de la Russie à les soutenir, et au manque d’engagement des forces de maintien de la paix russes dans le conflit.
La Russie, qui dispose d’un contingent de soldats de la paix sur place, n’a pas contenu la crise du Haut Karabakh et a été accusée d’inaction à de nombreuses reprises. Le Premier ministre arménien, Nikol Pachinian, a qualifié de "stratégique" l'erreur de dépendre trop de la Russie en matière de sécurité. Cette déclaration inhabituelle reflète le désenchantement croissant de l'Arménie à l'égard de la Russie.
En parallèle, l'épouse de Nikol Pachinian s'est rendue à Kiev pour participer à une réunion de conjoints de dirigeants, organisée par la femme du président ukrainien Volodymyr Zelensky, sur des questions humanitaires. Cette démarche traduit le mécontentement des Arméniens envers la Russie, qui, selon eux, n'a pas été en mesure de les aider pendant la guerre du Karabakh ni de gérer les conséquences de ce conflit. En fin de compte, l'Arménie exprime un besoin croissant de diversifier ses alliances et de réévaluer sa relation avec la Russie, face à l'incertitude quant à la politique de Moscou dans la région du Caucase.
Dans ce contexte de tensions accrues entre l'Arménie et la Russie, l'Arménie a officiellement rejoint la Cour pénale internationale (CPI) ce 13 octobre, en ratifiant le Statut de Rome. Aux yeux de son gouvernement, cette démarche vise à renforcer la protection de l'Arménie face à l'Azerbaïdjan, ayant mis fin au séparatisme Arménien au Haut-Karabakh. L'adhésion à la CPI offre à l'Arménie la possibilité d'encourager des enquêtes sur les "crimes de guerre" commis par l'Azerbaïdjan dans cette région, bien que ces accusations soient rejetées par Bakou.
Cette décision a toutefois suscité la colère de la Russie, étant donné la détérioration des relations entre les deux pays que cela représente. Le Kremlin a qualifié cette décision d'"erronée" et a exprimé des doutes quant à son impact sur les relations bilatérales, la CPI ayant émis un mandat d'arrêt contre le président russe Vladimir Poutine.
Corruption : la diplomatie du Caviar
Dans le monde complexe de la diplomatie, les stratégies d'influence prennent parfois des formes étonnantes et discutables. La diplomatie du caviar est l'une de ces méthodes intrigantes qui a captivé l'attention du public et des médias.
Le terme « Caviar Diplomacy » est utilisé pour la première fois en 2012, dans un rapport de l'Initiative européenne de stabilité : « Caviar Diplomacy - Comment l'Azerbaïdjan a fait taire le Conseil de l'Europe ». Il est mentionné dans ce rapport que ce terme est utilisé dans les conversations informelles de fonctionnaires azerbaïdjanais pour décrire des invitations fastueuses accordés à des politiciens étrangers et à des représentants d'organisations internationales, entièrement aux frais de l'hôte azerbaïdjanais.
Cette stratégie ne s'arrête pas là, puisque ces extravagances sont accompagnées de cadeaux somptueux, présentés comme des hommages à la tradition orientale.
Cependant, en septembre 2017, une grande enquête d'investigation menée par dix journaux européens, dont Le Monde, en collaboration avec l'Organized Crime and Corruption Reporting Project, a révélé que la diplomatie du caviar dépassait largement le cadre du simple lobbying. Elle s'apparentait plutôt à un système de corruption subtil, s'insinuant progressivement du don de petits présents au versement de pots-de-vin. Cette enquête a également mis en lumière les liens entre ces activités et le système de "lessiveuse" élaboré par le gouvernement azerbaïdjanais.
L'objectif principal de l'Azerbaïdjan à travers cette méthode ? Faire taire toute critique concernant sa politique en matière de droits humains et sur son traitement des populations arméniennes.
Voici un aperçu des différentes affaires liées à la stratégie de corruption de l'Azerbaïdjan qui soulève des questions importantes sur l'éthique et la transparence dans les relations internationales :
- Enquête de 2012 par l'Initiative européenne de stabilité (ESI)
En 2012, l'ESI a publié un rapport révélant les pratiques d'influence de l'Azerbaïdjan, notamment des cadeaux coûteux tels que du caviar noir, offerts à des membres de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe (APCE) et à des employés du secrétariat de l'APCE. Ces cadeaux ont soulevé des préoccupations quant à l'influence indue de l'Azerbaïdjan sur les décisions de l'APCE.
- Élections présidentielles de 2013
Les élections présidentielles de l'Azerbaïdjan en 2013 ont été entachées d'irrégularités et de controverses. Malgré les préoccupations exprimées par les observateurs internationaux, y compris ceux de l'OSCE/ODIHR, des membres de l'APCE soutenus par l'Azerbaïdjan ont qualifié ces élections de démocratiques, soulevant des questions sur leur impartialité.
- 2015 et le Parlement européen
En 2015, lors des discussions sur une résolution concernant les prisonniers politiques au Parlement européen, les rapporteurs pro-azerbaïdjanais ont rédigé un texte qui contenait peu de critiques envers l'Azerbaïdjan. Cependant, cette résolution a été adoptée, marquant un tournant dans la politique de l'UE à l'égard de l'Azerbaïdjan. Le Parlement européen a appelé l'Azerbaïdjan à mettre fin à la répression des défenseurs des droits de l'homme, à suspendre la révision de la loi sur les organisations non gouvernementales et à cesser de faire pression sur les journalistes, menaçant même d'imposer des sanctions.
- Enquêtes par le parquet italien et à l'APCE
En 2016, le parquet de Milan a porté des accusations de corruption et de blanchiment d'argent contre Luca Volontè, ancien chef du groupe du Parti populaire européen à l'APCE. Volontè a été accusé d'avoir reçu des paiements pour soutenir les intérêts azerbaïdjanais. Cela a entraîné des enquêtes et des sanctions à l'APCE, mettant en évidence l'influence néfaste de la diplomatie du caviar.
- Diplomatie Française
En France, l'Association des Amis de l'Azerbaïdjan (AAA) est considérée comme le principal outil de la diplomatie du caviar azerbaïdjanaise. L'AAA compte parmi ses membres du conseil d'administration plusieurs parlementaires français, qu'ils proviennent de l'Assemblée nationale ou du Parlement européen. Parmi les parlementaires associés à l'AAA, on retrouve Jean-Marie Bockel, Rachida Dati, Nathalie Goulet, Thierry Mariani et André Villiers. Cette association a été créée par l'ancien député Jean-François Mancel, qui défend l'Azerbaïdjan en tant qu'« extraordinaire modèle de tolérance et de respect de l'autre ».
L'AAA est principalement financée par la Fondation Heydar Aliyev, dont la dirigeante est Mehriban Aliyeva, l'épouse du président azerbaïdjanais. Pour promouvoir l'Azerbaïdjan, l'AAA n'hésite pas à offrir des incitations à des parlementaires, tels que des invitations à des courses de Formule 1 à Bakou. Plusieurs parlementaires français, dont Éric Doligé, Alain Vasselle, Rachida Dati et Alain Houpert, ont ainsi été invités en Azerbaïdjan grâce aux largesses du pouvoir azéri. La Formule 1 est régulièrement utilisée par l'Azerbaïdjan dans sa stratégie d'influence.
La Fondation Heydar Aliyev, pour sa part, finance directement et généreusement la restauration d'édifices religieux chrétiens, le département des arts islamiques du musée du Louvre, le château de Versailles, ainsi que des réceptions et dîners somptueux à Paris. En 2014, des personnalités telles que Gérard Depardieu et Patrick Bruel ont été aperçues lors de ces événements, et des élus français, dont Claude Goasguen, Rachida Dati, Jean-François Mancel et Aymeri de Montesquiou, ont partagé la table de la Première dame d'Azerbaïdjan.
En novembre 2018, le député Pierre-Alain Raphan a cherché à créer en France une association de promotion de l'Azerbaïdjan, et il a sollicité un financement de 2,8 millions d'euros via l'ambassade azerbaïdjanaise à Paris après avoir été élu président du « groupe d'amitié France-Azerbaïdjan » de l'Assemblée nationale, ce qui a été révélé par le magazine Marianne.
- Corruption en Allemagne
En mars 2021, une enquête de police a été ouverte en Allemagne impliquant plusieurs membres du Bundestag sous des accusations de corruption, les accusant d'avoir reçu des fonds via un système de blanchiment d'argent mis en place par l'État azerbaïdjanais. Cette affaire a provoqué un vif mécontentement au sein de la classe politique allemande et est devenue célèbre sous le nom d'« affaire azerbaïdjanaise ». Tout a débuté en janvier 2021 lorsque le Bundestag a levé l'immunité parlementaire de l'élue CDU Karin Strentz. Elle est accusée d'avoir reçu plus de 22 000 € de pots-de-vin en échange d'actions favorables à l'Azerbaïdjan au sein de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe (APCE).
L'ancien député du CSU, Eduard Lintner, qui a été secrétaire d'État au ministère de l'Intérieur, est également impliqué dans cette affaire de corruption. On lui reproche d'avoir illégalement reçu plus de 4 millions d'euros entre 2008 et 2016, qu'il aurait ensuite redistribués à plusieurs députés de l'APCE afin d'obtenir leur vote favorable à l'Azerbaïdjan. Ce vote a bloqué des rapports dénonçant les élections frauduleuses en Azerbaïdjan et les demandes de libération de prisonniers politiques.
Le 4 mars 2021, le Bundestag a également retiré l'immunité parlementaire à Axel Fischer, à la suite d'une demande du procureur de Munich. Il est la cible d'enquêtes de l'Office fédéral de police criminelle pour corruption active au sein de l'APCE. De plus, il a été démis de ses fonctions à la commission qu'il présidait au Bundestag.
Certains médias ont également critiqué la ligne éditoriale de TV Berlin, une chaîne de télévision locale liée au régime d'Aliyev en Azerbaïdjan, diffusant des reportages complaisants envers la dictature azerbaïdjanaise.
- Corruption au sein de l'UNESCO
L’enquête menée par l'OCCRP en 2017 a révélé que Kalin Mitrev, mari d'Irina Bokova, qui avait occupé le poste de directrice générale de l'UNESCO de 2009 à 2017, avait reçu d'importantes sommes d'argent de la part de ce que l'on qualifie de « lessiveuse » azerbaïdjanaise. Il est important de noter que la femme du président azerbaïdjanais, Mehriban Aliyeva, était ambassadrice de bonne volonté au sein de l'UNESCO depuis 2004. Cependant, elle a démissionné de ses fonctions au milieu d'allégations de corruption et de népotisme. Ces révélations ont soulevé des questions concernant l'influence de l'Azerbaïdjan au sein d'organisations internationales.
L'Azerbaïdjan semble avoir mis en place un vaste réseau d'influence à travers diverses stratégies de corruption, de lobbying et de cadeaux somptueux à des acteurs politiques en Europe. Ces pratiques ont soulevé des préoccupations quant à l'intégrité et à l'indépendance des acteurs européens, y compris au sein des organisations internationales, entravant leur capacité à agir de manière indépendante et à défendre des valeurs telles que la démocratie et les droits de l'homme. Cette diplomatie du caviar souligne la nécessité d'une plus grande transparence et de mécanismes de lutte contre la corruption plus solides pour préserver l'intégrité des institutions et la prise de décision indépendante en Europe.
Le Cynisme de la realpolitik
L’Union Européenne devrait être vent debout contre le projet du corridor de Zanguezour qui renforcerait la puissance Turque et Azéri. En plus de renforcer des pays potentiellement belliqueux à son égard, ce point de passage ouvrirait une nouvelle route d’immigration illégale depuis l’Asie centrale (et les possibles « migrations instrumentalisées » rendues possibles par ce nouveau point de passage, phénomène que nous évoquerons plus bas dans cet article). La stabilité de l’UE pourrait donc être grandement mise en péril par l’avènement d’un tel projet.
Mais le cynisme inhérent à la realpolitik a pu inciter certains acteurs européens à privilégier leurs intérêts économiques et géopolitiques au détriment des principes humanitaires et de la stabilité régionale.
Dans le meilleur des mondes et sans regarder les aspects économiques, d’un point vu uniquement morale, éthique et historique, les pays occidentaux et notamment la France, devraient soutenir l’Arménie, qui est une nation sœur. Je rappelle que nous avons soutenu (et que nous soutenons toujours) le protectorat Américain d’Ukraine, avec qui nous ne partageons rien, alors même que ce pays est profondément corrompu et a toujours été considéré comme une plaque tournante mafieuse et opaque privilégiée pour les trafics en tous genres (êtres humains, armes, enfants, organes …) et le blanchiment d’argent. Ce n’est d’ailleurs pas une surprise de retrouver une grande partie de l’armement fourni à l’Ukraine, aux mains de groupes terroristes, et notamment celles du Hamas. L’OTAN via l’UE et via l’Ukraine a donc grandement participé aux attaques terroristes visant Israël. L’Ukraine devenant ainsi une plaque tournante pour le trafic d’armes et le soutient aux réseaux terroristes du monde entier, une nouvelle corde à leur arc.
Or, nous partageons avec l’Arménie des racines chrétiennes profondément ancrées dans nos histoires respectives. Effectivement, le christianisme et le patrimoine culturel partagé, sont des éléments importants des liens religieux et civilisationnels entre nos deux pays, qui devraient prévaloir sur les intérêts économiques que nous entretenons avec des pays dont les civilisations et les cultures sont parfois aux antipodes. Mais le mondialisme, nouvelle religion de Mme Von der Leyen (puisque c’est désormais Bruxelles qui guide notre politique extérieure) est dénué de tout sens moral. Il faut faire des choix d’ordre économiques et politiques et tant pis si des peuples alliés en payent le prix.
Nous sommes bien les seuls (nations occidentales d’Europe de l’Ouest) à nous renier autant, à abandonner toutes figures transcendantales et toutes idées de sacrées, alors même que ces dernières devraient être un phare pour nos civilisations et devraient nous unifier dans une destinée commune. Tout ce que nous sommes, sacrifié sur l’autel de la laïcité et de la république. L’opportunité de faire tomber l’occident est réel. Ce projet en est un parmi tant d’autre.
La Turquie, l’Azerbaïdjan et tous les pays d’Asie centrale évoqués en amont, sont alliés et souhaite renforcer leurs liens et leur collaboration, justement parce qu’ils partagent une vision du monde commune, qui découlent de valeurs religieuses puisque ce sont tous des pays à forte majorité musulmane. Faire fi de cette dimension religieuse, c’est occulter un point majeur, voire même principale dans toutes ces opérations.
La création de ce corridor est donc un acte profondément impérialiste, qui, n’ayons pas peur des mots, nous entraîne de plus en plus vers une guerre des civilisations. Les puissances potentiellement belliqueuses renforçant leur pouvoir et leur capacité d’intervention.
Mais il n’en est rien ! L’UE dirigée d’une main de fer par Mme Von der Leyen a fait de l’Azerbaïdjan un partenaire économique privilégié (notamment sur la question du gaz, en doublant ses commandes et en réaffirmant leur importance). Pourtant le gaz azerbaïdjanais ne représente actuellement que 3 % du gaz importé dans l'Union européenne. Selon le représentant de l'Arménie auprès de l'UE, il est important de noter que c'est l'Azerbaïdjan qui a une dépendance significative vis-à-vis de l'Union européenne en termes d'exportations de gaz, et non l'inverse. En effet, une interruption des exportations de gaz vers les pays de l'UE entraînerait une perte de revenus estimée à 15,6 milliards d'euros par an pour Bakou.
À ce jour, l'Union européenne a choisi de ne pas imposer de sanctions, certaines personnalités, dont le président français Emmanuel Macron, considérant qu'elles pourraient avoir des effets contre-productifs.
De plus, la position stratégique de la Turquie lui permet de faire pression sur toute l’Europe et donc sur Bruxelles. Une position qu’elle exploite à merveille lorsqu’il s’agit de faire valoir ses intérêts. Au-delà de la création de ce couloir, la Turquie et l’Azerbaïdjan (qui sont extrêmement proche) souhaitent depuis longtemps éradiquer l’Arménie et ses habitants, et pratiquer ce que l’on pourrait appeler un « nettoyage ethnique » dans cette région qui lui est hostile (considérée comme telle en raison de sa chrétienté) et qui représente un obstacle à l’entente entre ces deux pays (Bakou et Ankara rêvant d’une voie sans entrave).
Tout le monde a en tête le génocide arménien qui a eu lieu pendant la Première Guerre mondiale, principalement entre 1915 et 1923, lorsque l'Empire ottoman, dirigé par le gouvernement Jeunes-Turcs, a entrepris une série de massacres, de déportations forcées et d'autres atrocités contre la population arménienne. Cet évènement a entraîné la mort de plusieurs centaines de milliers, voire d'un million ou plus d'Arméniens. La France fait partie des pays qui le reconnaissent officiellement.
Ce dernier a d’ailleurs entrainé une vague d’immigration arménienne vers notre pays, voie privilégiée et favorisée pour trouver refuge, notamment grâce à notre patrimoine culturel et religieux commun. La France a été une terre d’accueil pour les chrétiens du monde entier, d’où l’immense diaspora Arménienne présente en France et dont l’intégration et l’assimilation est un succès puisque nous partageons des racines, un patrimoine et une culture commune, qui facilite dès lors un vivre ensemble harmonieux.
On l’oublie souvent, mais il me semble important de rappeler que les chrétiens représentent le groupe religieux le plus persécuté au monde. Ce sont les chrétiens qui sont le plus victime de violence, de meurtres, de massacres, de dégradation d’édifice religieux … Bref, de persécutions. Dans la mesure où les nouveaux narratifs tentent de créer une réalité parallèle complétement fantasmée et hors sol, il est toujours bon de rappeler quelques vérités factuelles.
Tandis que les tensions entre Bakou et Erevan se sont aggravées ces derniers mois, l’Azerbaïdjan bloquant le corridor de Latchine, l’unique route reliant l’Arménie au Nagorny-Karabakh, ce qui a provoqué d’importantes pénuries dans l’enclave peuplée majoritairement d’Arméniens.
Les Azéris partagent sur Telegram leurs crimes de guerres et victimes comme des trophées, adultes comme enfants. Fiers de cette épuration ethnique, certains postent même leur butin de chair en photo de profil (oreilles, visage, etc). Les corps sans vie des Arméniens sont découpés, puis mis en scène, moqués, profanés. Des dizaines de vidéos sont consultables avec en légende le montant des primes pour les auteurs des faits et des propos irrespectueux envers les victimes. L’horreur et la barberie n’a pas de limite.
Ces chaînes Telegram, favorables à l'Azerbaïdjan, utilisent des termes empreints de haine pour désigner de manière collective les Arméniens, principalement en utilisant le terme "Ashot". Ces publications sont souvent accompagnées d'appels au meurte et à la violence à l'encontre des Arméniens. Par exemple, une chaîne nommée "Big Brother" a déclaré : "La paix viendra après l'éradication totale de l'État ashote dans le Caucase du Sud. Pas d'Ashots, pas de problèmes !". D'autres publications ont partagé des photos où l'on voit Ararat Mirzoyan, ministre des Affaires étrangères arménien, et Antony Blinken, secrétaire d'État américain, sourire, tandis que Jeyhun Aziz oglu Bayramov, ministre des Affaires étrangères azerbaïdjanais, ne sourit pas. La légende accompagnant la photo disait : "Vos visages quand vous avez appris que quatre Ashots ont été éliminés avec succès pendant la nuit. Cela continuera demain."
D’autres chaînes Telegram expriment le souhait que les Arméniens ne devraient pas exister non seulement au Karabakh, mais même dans la région du Caucase. Ces publications ont également partagé des coordonnées de positions militaires arméniennes, exposant ainsi ces emplacements à des risques d'attaques.
Certains de ces « influenceurs de guerre » célèbrent la mort d'Arméniens en utilisant des comparaisons dégradantes. Par exemple, une chaîne Telegram appelée "Angry Mamed" a publié une image d'un porc rôti aux côtés de la légende : "Petit Ashot frit, petit Ashot cuit à la vapeur, petit Ashot voulait aussi vivre."
La déshumanisation de l'ennemi est un concept qui est souvent évoqué dans le contexte de conflits, de guerres, de génocides et d'autres situations de violence extrême. Il se produit lorsque l'ennemi, ou le groupe adverse, est délibérément dépeint de manière à le priver de son humanité, le réduisant ainsi à une entité abstraite, dénuée de droits, de compassion et de considération.
La déshumanisation est un mécanisme psychologique qui permet de justifier des actes inhumains envers l'ennemi. Elle peut prendre de nombreuses formes, notamment la propagande qui dépeint le groupe ennemi comme des monstres, des animaux ou des menaces existentielles. En éliminant l'humanité de l'ennemi, il devient plus facile pour une société de tolérer, voire d'encourager, des actions brutales, telles que des massacres, des génocides, des tortures et d'autres atrocités.
Un autre terme largement employé était "Astvat", le mot arménien pour "Dieu". Ces publications utilisaient ce terme de manière insultante pour désigner les Arméniens en raison de leur foi chrétienne, face à la majorité musulmane en Azerbaïdjan. Certains posts appellent ainsi à regrouper tous les Arméniens et à les "réduire en cendres".
Ces publications injurieuses sont un exemple frappant de la haine extrême et de l'hostilité persistantes envers les Arméniens, qui ont des racines profondes et remontent à la période du génocide au début du siècle dernier.
Génocide arménien : le déni de l’indéniable
Sur cette question du génocide Arménien (qui est ni plus ni moins qu’une épuration ethnique et religieuse), il est intéressant de voir que beaucoup d’alliés historiques de la Turquie ne le reconnaissent officiellement pas (notamment le Kazakhstan, l’Ouzbékistan, le Tadjikistan, le Turkménistan et le Kirghizistan, évoqué plus haut et partie prenante de l’idéologie panturque, ou néo-Ottomanisme, promue par la Turquie). Au même titre que l’Algérie, l’Arabie Saoudite, la Tunisie … Comme dit l’adage « qui ne dit mot consent », ce qui dénote un soutien aveugle à la Turquie.
Il existe pourtant un ouvrage qui invalide toute tentative de nier le génocide arménien. Les documents qu'il renferme sont incontestables, et il est impossible de les ignorer. Jusqu'à présent, la position officielle de la Turquie consistait à persister dans le déni et à discréditer ou ignorer systématiquement les innombrables témoignages de ce crime historique. Aujourd'hui, simplement évoquer le génocide arménien dans l'Empire ottoman peut entraîner des conséquences graves, allant de l'ostracisme intellectuel et social à des peines d'emprisonnement, en vertu de l'article 301 notoire du code pénal turc, voire à la réclusion à perpétuité.
Le livre "Ordres de tuer" de Taner Akçam est une publication historique qui a eu un impact significatif en mettant en lumière l'authenticité des documents relatifs au génocide arménien. L'auteur, Taner Akçam, est un historien, sociologue et journaliste turc qui a été l'un des premiers académiciens turcs à reconnaître le génocide arménien. Le livre révèle des preuves irréfutables de l'implication des dirigeants ottomans, notamment Talaat Pacha, dans l'extermination systématique de la population arménienne.
Taner Akçam lui-même a une histoire personnelle remarquable en tant que dissident turc. Il a été arrêté en Turquie en 1976 pour avoir publié un magazine étudiant traitant de l'oppression des Kurdes, puis s'est échappé de prison pour chercher refuge en Allemagne, où il a obtenu le statut de réfugié politique. Il a poursuivi sa carrière académique en Allemagne et aux États-Unis, devenant un chercheur éminent sur le génocide arménien.
Son ouvrage "Ordres de tuer" repose sur des documents uniques provenant des archives du père Krikor Gergeryan, qui a été témoin du génocide arménien en tant qu'enfant. Ces archives, comprenant plus de 100 000 pages de documents, ont été remises à Taner Akçam par Edmond Gergeryan, le neveu du père Krikor. Les documents comprennent des télégrammes de Talaat Pacha lui-même, ministre de l'Intérieur de l'Empire ottoman, donnant des ordres explicites pour l'extermination des Arméniens. La plupart des ordres émis par Talaat Pacha ont été ultérieurement détruits ou cachés par le gouvernement turc, mais certaines copies ont survécu grâce à Naim Efendi Bey, qui travaillait au bureau de déportation à Alep, une étape cruciale de la route de la mort pour de nombreux Arméniens.
Le livre examine en détail la méthodologie de Taner Akçam pour authentifier ces documents, y compris l'analyse des méthodes de cryptage, la comparaison des signatures et du papier utilisé, ainsi que la corroboration avec d'autres documents de l'époque. L'auteur démontre de manière convaincante que ces documents sont authentiques et qu'ils constituent une preuve incontestable du génocide arménien.
La publication de ces documents a remis en question le déni persistant de la Turquie et a renforcé la position des chercheurs et des historiens qui reconnaissent le génocide arménien comme un fait historique incontestable.
La guerre par proxy du Panturquisme contre l’Arménie
Dès l'annonce des premières pertes civiles et militaires lors des combats dans la région du Haut-Karabakh le 27 septembre, le président turc Recep Tayyip Erdogan a rapidement rappelé que les populations des deux pays formaient "un seul et unique peuple" et qu'Ankara soutenait pleinement la république caucasienne. Le 28 septembre, le leader turc a de nouveau appelé à la fin de "l'occupation" arménienne du Karabakh. En Turquie, la presse a unanimement relayé la version d'une agression arménienne, ravivant ainsi l'hostilité historique envers le pays et son peuple. Les réactions du côté turc n'ont pas tardé.
Dans un message sur les réseaux sociaux, le président Erdogan a critiqué la partialité de la communauté internationale et l'inefficacité du groupe de Minsk, composé de la France, des États-Unis et de la Russie, chargé des négociations entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan. Il a déploré le manque de réaction appropriée face à l'attaque provoquée par l'Arménie, accusant une fois de plus la communauté internationale de pratiquer la politique du double standard. Il a également dénoncé la "négligence" persistante du trio Minsk au cours des trois dernières décennies.
Ilhan Üzgel, professeur à l'université d'Ankara et spécialiste des relations internationales, explique : "L'Azerbaïdjan est un pays d'importance cruciale pour la Turquie. Sa population partage la même origine ethnique, et du point de vue stratégique, l'Azerbaïdjan fournit du gaz naturel à la Turquie. De plus, les deux pays ont formé une coalition contre l'Arménie.
La Turquie, engagée dans une politique étrangère agressive, voit dans ce conflit une opportunité supplémentaire de s'affirmer comme une puissance incontournable dans la région. La presse favorable au gouvernement alimente également les tensions en attisant les flammes. Ibrahim Karagül, chroniqueur et rédacteur en chef du quotidien Yeni Safak, a titré : "Nous remportons la victoire dans le Caucase. La solution militaire est désormais la seule option." Il a ajouté que "si un cessez-le-feu est de nouveau déclaré, les attaques arméniennes se poursuivront."
L'implication de la Turquie s'est avérée déterminante, car elle a fourni un soutien militaire à l'Azerbaïdjan, notamment en fournissant des drones. Le pouvoir de l'AKP, le parti islamo-conservateur du président turc, déjà affaibli par la pandémie de Covid-19 et la crise économique, peut tirer ponctuellement avantage du conflit au Haut-Karabakh en attisant le nationalisme.
Erdogan n'en est pas à son premier coup d'essai dans la consolidation du pouvoir et la transformation de l'identité nationale turque. Après le coup d'État manqué de 2016 en Turquie, dirigé par une faction au sein de l'armée, Recep Tayyip Erdoğan a entrepris un processus de consolidation de son pouvoir et de réorganisation de l'armée pour éliminer les éléments kemalistes, ce qui a permis d'accélérer la synthèse des trois idéologies en Turquie : le nationalisme turc (kemalisme), l'islamisme associé à Fethullah Gülen, et le panturquisme.
Tout d'abord, Erdoğan a éliminé des milliers d'officiers et de hauts gradés de l'armée, principalement ceux qui étaient considérés comme proches des idéaux kémalistes. Cela lui a permis de réduire considérablement l'influence des militaires laïques et nationalistes au sein de l'institution militaire. Les purges ont également touché d'autres secteurs de la société, notamment les médias, la magistrature et l'éducation, afin d'éliminer les partisans de Gülen, qu'Erdoğan considérait comme une menace.
Erdoğan a réussi à naviguer habilement entre le nationalisme turc, l'islamisme et le panturkisme, pour faire la synthèse de ces idéologies. Il a utilisé le nationalisme turc pour consolider son pouvoir en mobilisant un sentiment de fierté nationale et en renforçant l'unité du pays. En parallèle, il a maintenu une base de soutien religieux en s'appuyant sur les valeurs islamiques et en s'alliant avec des groupes conservateurs religieux.
Le panturkisme a été exploité de manière sélective pour renforcer les liens de la Turquie avec les pays turcophones d'Asie centrale, ce qui a renforcé l'influence de la Turquie dans cette région.
L'idée du nouvel impérialisme ottoman, ou néo-ottomanisme, est évoquée par l'ambition de la Turquie sous Erdoğan de jouer un rôle plus influent dans la région, similaire à celui de l'Empire ottoman dans le passé. Cela s'est manifesté par une politique étrangère plus assertive, notamment par des interventions en Syrie et en Libye, ainsi que par des tentatives de médiation dans les conflits régionaux.
Cette synthèse a contribué à la vision d'un nouvel impérialisme ottoman, bien que des obstacles subsistent, notamment la question arménienne et les tensions régionales. Guillaume Perrier, dans son livre "Les Loups Aiment la Brume," fournit une analyse approfondie de ces développements et de leurs implications.
La question arménienne est un point de friction important dans cette dynamique. Les relations entre la Turquie et l'Arménie sont depuis longtemps tendues en raison du génocide arménien toujours dénié par les Turques. Cette question divise la Turquie et crée des tensions avec de nombreux pays occidentaux. L'Arménie, en tant qu'État situé dans une région stratégique, constitue un obstacle réel aux ambitions régionales de la Turquie, et les différends autour de la question arménienne compliquent encore davantage la mise en œuvre d'un néo-ottomanisme réussi. Ainsi, pour réaliser pleinement le projet du panturquisme, la Turquie devra inévitablement mener à terme sa guerre par procuration contre l'Arménie, ce caillou sur son chemin. Le 3 octobre, le média turque Türkiye préparait l’opinion en écrivant : « La nouvelle maison du serpent est Zangezur », « Entrainés par l’Iran et l’Occident, les Arméniens expulsés du Haut-Karabagh ont établi 17 camps terroristes en Zangezur. »
Israël, alliée des azéris
Plus que les drones turcs, ce sont les technologies militaires et la communauté du renseignement israélienne qui ont joué un rôle significatif dans la conquête rapide du Haut-Karabakh par l'armée azérie. Une enquête du journal israélien Haaretz a révélé qu'Israël exporte par avion des centaines de tonnes d'armes et d'explosifs vers l'Azerbaïdjan en échange de pétrole. Les relations entre l'Azerbaïdjan et Israël sont étroites depuis longtemps, tandis que les Arméniens entretiennent des relations cordiales avec les Iraniens.
Cette proximité entre l'Azerbaïdjan et Israël s'explique en grande partie par leur perception commune de l'Iran comme une menace directe. L'Iran compte en effet une forte minorité azérie, entretenant des liens ancestraux et communautaires avec les populations azéries vivant de l'autre côté de la frontière. Le pouvoir iranien a toujours craint que l'Azerbaïdjan devienne une base arrière pour une partie de l'opposition, d'où son soutien aux Arméniens, ennemis historiques des Azéris.
L’enquête menée par le journal progressiste Haaretz, basée sur des données aéronautiques accessibles au public, a révélé qu'au cours des sept dernières années, 92 vols de fret effectués par la compagnie azérie "Silk Way Airlines" ont atterri à Ovda, le seul aérodrome d'Israël par lequel des explosifs peuvent être transportés par avion.
Le scénario est le suivant : un avion-cargo Ilyushin-76 azéri atterrit sur cette base aérienne israélienne d'Ovda, au nord d'Eilat, un port israélien sur la Mer Rouge. En deux heures, l'appareil est chargé, puis les deux pilotes remontent dans le cockpit et l'avion redécolle pour regagner son terrain d'origine à Bakou, la capitale de l'Azerbaïdjan.
Silk Way est l'une des plus grandes compagnies aériennes de fret en Asie et exploite trois vols hebdomadaires entre Bakou et l'aéroport international Ben Gourion avec des cargos Boeing 747. En 2022, Silk Way était le troisième affréteur étranger à l'aéroport Ben Gourion, ce qui témoigne de l'ampleur de cette coopération.
Israël et l'Azerbaïdjan entretiennent une alliance stratégique discrète depuis deux décennies. Israël vend des armes à cette république chiite, qui en retour fournit du pétrole à Israël et lui offre un poste d'observation sur l'Iran. Près de la moitié du pétrole d'Israël provient de l'Azerbaïdjan, et selon l'Institut international pour la paix de Stockholm, Israël fournit près de 70 % des armes de l'Azerbaïdjan.
Il existe des rumeurs selon lesquelles le Mossad, le service de renseignement extérieur d'Israël, aurait des bureaux en Azerbaïdjan pour surveiller l'Iran. De plus, on dit qu'un aérodrome en Azerbaïdjan pourrait être utilisé par Israël en cas d'attaque contre les sites nucléaires iraniens. Il y a deux ans, des articles de presse ont affirmé que les agents du Mossad, qui ont volé les archives nucléaires iraniennes à Téhéran, les ont exfiltrées d'abord en Azerbaïdjan, avant de les charger dans un avion pour les ramener en Israël.
En échange de pétrole et de services politiques, Israël a vendu à l'Azerbaïdjan des systèmes d'armes avancés, notamment des missiles balistiques, des systèmes de défense aérienne, de guerre électronique, ainsi que des drones kamikazes, entre autres.
Les avions Silk Way et d'autres ont atterri à Ovda près de 100 fois depuis la délivrance du permis d'atterrissage initial. Chaque augmentation des vols vers Bakou, observée au milieu de 2016, à la fin de 2020 et à la fin de 2021, correspond à des périodes de combats au Haut-Karabakh.
Cette coopération entre Israël et l'Azerbaïdjan s'est avérée être une opportunité commerciale et stratégique pour Israël. L'Azerbaïdjan a déclaré son indépendance en octobre 1991, et Israël a été l'un des premiers pays à reconnaître cette nouvelle nation, ouvrant une ambassade à Bakou en 1993. Comme l'a reconnu Rob Garverick, chef du département politique et économique de l'ambassade des États-Unis à Bakou, dans un télégramme de 2009 publié dans le cadre des documents de Wikileaks, "Les relations de l'Azerbaïdjan avec Israël sont discrètes mais étroites", avec une identification mutuelle des deux pays aux défis géopolitiques et une préoccupation commune concernant l'Iran, qu'ils considèrent comme une menace existentielle.
Le pays hébreu contribue donc indirectement au massacre des chrétiens en Arménie (comme ça a déjà été le cas au Liban) … Israël ne défend ici que ses propres intérêts. Certains observateurs estiment que le jeu d'alliances d'Israël, en fonction de ses intérêts nationaux, pourrait contribuer de manière indirecte à l'avènement du corridor de Zanguezour, en dépit des implications et des préoccupations liées au conflit régional.
Une route qui pourrait faciliter les « migrations instrumentalisées » ?
L'avènement du corridor envisagé par la Turquie et l'Azerbaïdjan soulève des préoccupations quant à la création de nouvelles opportunités pour des "migrations instrumentalisées". Ce corridor, s'il était mis en place, pourrait potentiellement devenir une voie de transit majeure pour les flux migratoires, offrant ainsi une nouvelle avenue pour les acteurs géopolitiques souhaitant exploiter la mobilité humaine à des fins politiques.
Le concept de "Weaponized migration", ou "migration instrumentalisée", fait référence à l'utilisation des flux de migration comme une arme ou un outil politique dans le but de déstabiliser des nations ou des régions. Cette stratégie consiste à exploiter la mobilité humaine à des fins géopolitiques, en poussant délibérément des groupes de migrants vers un pays ou une région cible afin de créer des tensions, des problèmes socio-économiques, voire de perturber la stabilité politique.
L'idée derrière cette tactique est de provoquer des crises internes, des troubles sociaux, et de mettre sous pression les institutions gouvernementales et les infrastructures d'accueil du pays cible. Cela peut avoir un impact significatif sur la sécurité nationale, la cohésion sociale, l'économie et la politique intérieure de la nation visée.
Une immigration instrumentalisée par la Turquie
Un exemple potentiel de "weaponized immigration" pourrait justement être envisagé en relation avec la Turquie. En cas de conflit sur la question arménienne, la Turquie pourrait choisir de manipuler les flux migratoires en direction de l'Union européenne (UE) pour exercer une pression politique sur les pays membres de l'UE. La Turquie partage une frontière terrestre avec l'UE, en particulier avec la Grèce et la Bulgarie, ce qui faciliterait la circulation des migrants.
Dans un scénario hypothétique, la Turquie pourrait encourager ou permettre à un grand nombre de migrants, en particulier en provenance de pays tiers, de traverser sa frontière en direction de l'UE. Le corridor de Zanguezour faciliterait et amplifierait d’autant plus le pouvoir de nuisance de cette stratégie. Cela pourrait créer une crise humanitaire, économique et politique dans les pays de l'UE qui seraient confrontés à un afflux massif de migrants, ce qui pourrait potentiellement provoquer des tensions au sein de l'UE et entre ses membres. Les pays de l'UE devraient alors faire face à des défis tels que la gestion des demandes d'asile, la sécurité aux frontières, et la pression sur les ressources sociales.
L'objectif de la Turquie dans un tel scénario pourrait être de faire pression sur l'UE pour obtenir des concessions politiques ou diplomatiques liées à la question arménienne ou à d'autres intérêts géopolitiques. Cette stratégie mettrait également en lumière les vulnérabilités de l'UE en matière de gestion des migrations et soulignerait l'importance de la coopération internationale pour faire face à de tels défis.
Sur la scène internationale, l'utilisation des migrations à des fins de pression politique ou de déstabilisation d'un autre pays est couramment perçue comme une violation des principes fondamentaux du droit international. Ces principes incluent la souveraineté des États, le respect des droits de l'homme, notamment le droit d'asile. Bien que ces instruments juridiques puissent être invoqués pour condamner l'utilisation politique des migrations, il n'existe actuellement aucun traité international spécifique qui traite explicitement de l'"instrumentalisation des migrations" en tant que concept indépendant.
L’émigration instrumentalisée, comme possible réponse à des sanctions
L'utilisation d'une diaspora pour provoquer des troubles ou des actions illégales dans un pays étranger peut être décrite comme une forme d'"émigration instrumentalisée" ou de "diaspora instrumentalisée". Cette terminologie met en lumière le fait que des acteurs étatiques ou d'autres entités exploitent une communauté diasporique à des fins politiques ou géopolitiques, souvent en incitant ses membres à agir de manière préjudiciable à l'intérieur du pays hôte.
Les Loups Gris turcs, également connus sous le nom de "Bozkurtlar" en turc, sont un mouvement nationaliste d'extrême droite en Turquie. Fondé dans les années 1960, ce groupe s'est développé en tant qu'organisation de jeunesse liée au Parti du Mouvement Nationaliste (MHP), qui promeut une idéologie nationaliste turque et panturque. Au fil des décennies, les Loups Gris ont été associés à diverses activités nationalistes et ont été accusés d'actions violentes.
En France, la présence des Loups Gris est attestée depuis plusieurs années en raison de la diaspora turque qui y réside. Le groupe a suscité des préoccupations en raison de ses activités et de son idéologie nationaliste radicale. Cependant, il est important de noter que le gouvernement français n'a pas désigné les Loups Gris comme une organisation terroriste. La dissolution du groupe en France en 2020 a été décidée par le ministre de l'Intérieur de l'époque, Gérald Darmanin, en raison de ses préoccupations concernant les activités du groupe et son potentiel de perturbation de l'ordre public. Cependant, il n'y a pas eu d'arrestations immédiates à la suite de cette dissolution.
La déclaration du président turc Recep Tayyip Erdogan a suscité des inquiétudes supplémentaires. En septembre 2020, lors de tensions entre la France et la Turquie liées à des questions diplomatiques, Erdogan a laissé entendre que la France ferait bien de se méfier de ses propres citoyens d'origine turque, faisant allusion à la capacité de la Turquie à les "déstabiliser" à sa volonté. La déclaration a été interprétée comme une insinuation selon laquelle la Turquie pourrait potentiellement encourager des actions ou des troubles en France impliquant des citoyens d'origine turque si la France intervenait dans un conflit auquel la Turquie était partie prenante, comme le conflit arménien.
Cette déclaration a alimenté les inquiétudes concernant les tensions entre la France et la Turquie et a mis en évidence les préoccupations internationales liées aux activités des groupes nationalistes radicaux tels que les Loups Gris.
Dans un tel contexte, où un dirigeant politique étranger encouragerait sa diaspora en France à commettre des actes répréhensibles ou à perturber la stabilité de la France, cette pratique pourrait être analysée sous plusieurs angles au niveau de la sécurité internationale et du droit international.
Tout d'abord, cela pourrait être assimilé à une forme d'ingérence dans les affaires intérieures d'un autre pays, ce qui est généralement condamné par le droit international. L'incitation à des actions perturbatrices par des citoyens étrangers pourrait être interprétée comme une tentative de déstabilisation d'un État souverain, ce qui soulève des préoccupations majeures en matière de sécurité nationale.
De plus, cela pourrait être considéré comme une utilisation de la diaspora à des fins hostiles, ce qui n'a pas de précédent juridique clair mais qui pourrait être assimilé à une forme de manipulation politique des populations étrangères.
Bien que cette pratique puisse ne pas avoir une classification juridique spécifique à ce stade, elle soulève des inquiétudes graves en matière de sécurité internationale et de respect de la souveraineté nationale, ce qui justifie une attention accrue de la part de la communauté internationale pour élaborer des mécanismes de prévention et de réaction appropriés.
À l'ère de l'évolution constante des formes de conflits et de guerres, il devient de plus en plus impératif de reconnaître l'utilisation des migrations à des fins de déstabilisation comme une grave violation du droit international. Cette reconnaissance pourrait constituer une étape cruciale pour mettre en place des normes internationales spécifiques qui interdiraient clairement l'utilisation abusive des flux migratoires à des fins politiques ou hostiles. Il est essentiel d'adapter le droit international pour faire face aux réalités changeantes de la sécurité mondiale.
Il est essentiel de prendre en considération les implications que représenteraient ces migrations instrumentalisées dans le contexte du conflit entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan, tout en restant vigilants face au projet panturquiste. Si nous ne parvenons pas à soutenir l'Arménie et à prévenir l'émergence de cette menace, nous risquons de voir se généraliser le chantage à la submersion migratoire dans les conflits futurs. Il est urgent pour la France d'agir de manière ferme et responsable pour soutenir activement nos alliés Arméniens, et garantir ainsi à tous un avenir pacifique et stable, à l'abri des manipulations migratoires.
Avant de mettre en place des sanctions contre l'Azerbaïdjan en réponse aux allégations de crimes de guerre et d'autres violations des droits de l'homme dans le contexte du conflit arménien, il est donc essentiel que les acteurs internationaux prennent en considération la possibilité d'une instrumentalisation des migrations par le président turc, Recep Tayyip Erdoğan, en réponse aux sanctions dirigées contre ses alliés azerbaïdjanais dans le cadre de leur projet panturkiste. Des sanctions trop hâtives pourraient inciter Erdoğan à exploiter les flux migratoires de migrant ou la diaspora turque, comme un moyen de riposte ou de pression sur les pays européens. Cela nécessite une approche stratégique et coordonnée, non seulement pour condamner les violations des droits de l'homme, mais également pour anticiper et atténuer les conséquences potentielles sur la situation migratoire.
Nous exhortons instamment les nations européennes à entreprendre les mesures préliminaires essentielles en vue d'imposer des sanctions à l'encontre de l'Azerbaïdjan, dans le but de mettre un terme à son projet d'épuration ethnique.
Parallèlement, il est impératif de fournir un soutien direct à l'Arménie en lui offrant les moyens nécessaires pour sa défense, en réallouant si nécessaire l'aide accordée au gouvernement ukrainien, qui bénéficie déjà du soutien financier conséquent des États-Unis.
Enfin, nous présentons un projet de mémorandum de sanctions, fournissant un cadre concret permettant à la communauté internationale d'intervenir pour secourir cette nation liée à la France et de préserver son héritage culturel et religieux inestimable.
Il est d’autant plus urgent d’agir qu’Anthony Blinken, secrétaire d’état et chef de la diplomatie américaine, a averti samedi 14 octobre que l’Azerbaïdjan pourrait envahir l’Arménie dans les semaines à venir. À tel point qu’il annonce réfléchir à renoncer au partenariat militaire qui lie depuis 2002 les États-Unis et l’Azerbaïdjan.
Mémorandum de sanctions contre l'Azerbaïdjan
Sanctions économiques
Gel des avoirs de l'État azerbaïdjanais dans les pays signataires.
Imposition d'embargos sur les ventes d'armes et de matériel militaire à l'Azerbaïdjan.
Réduction ou la suspension de l'aide économique et du commerce bilatéral avec l'Azerbaïdjan.
Interruption des importations de gaz depuis l’Azerbaïdjan vers les pays de l'Union Européenne
Sanctions diplomatiques
L'adoption d'une résolution de la France, soutenue par d'autres États membres des Nations Unies, appelant à des sanctions internationales au sein de l'ONU en réponse aux allégations de crimes de guerre et à la détérioration de la situation humanitaire dans la région du Haut-Karabakh.
L'expulsion des diplomates azerbaïdjanais et la réduction du personnel diplomatique azerbaïdjanais dans les pays signataires.
La suspension de la participation de l'Azerbaïdjan dans des organisations internationales.
Sanctions contre le chef de l'État azerbaïdjanais
Interdiction de voyager pour le chef de l'État azerbaïdjanais et ses proches collaborateurs.
Gel des avoirs personnels du chef de l'État azerbaïdjanais dans les pays signataires.
Saisine de la Cour pénale internationale (CPI) pour enquêter sur les allégations de crimes de guerre commis par les forces azerbaïdjanaises.
Demande de mandat d'arrêt international envers le chef d'État azerbaïdjanais en cas de preuves concluantes de sa participation ou de sa responsabilité dans les crimes de guerre.
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Nous exprimons notre profonde gratitude envers
de
et
, Juriste Droit International, co-auteurs de cet article. Notre reconnaissance envers
et particulièrement
pour leur précieuse contribution.
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